Actualités
Quand l'échange d’informations commerciales entre concurrents n'est pas anticoncurrentiel

Quand l'échange d’informations commerciales entre concurrents n'est pas anticoncurrentiel

Publié le : 30/12/2024 30 décembre déc. 12 2024

Adlc, déc. n° 24-D-11 du 19 déc. 2024

Aux termes de sa décision n° 24-D-11, l’Autorité de la concurrence a mis hors de cause le GIFAM, organisme professionnel regroupant les marques d’appareils pour la maison, considérant que la pratique d’échanges de données individualisées et récentes sur les volumes de vente par catégorie de produits de petits électroménagers,  mise en oeuvre par le syndicat professionnel par l'intermédiaire de son extranet mis à disposition du secteur, n’est pas anticoncurrentiel.

L’Autorité a notamment considéré que « s'il apparaît que les données échangées étaient susceptibles de présenter un intérêt pour les directeurs commerciaux afin de réaliser des analyses rétrospectives et comparer leurs résultats à ceux de leurs concurrents cela ne saurait suffire à conclure que leur échange était susceptible de réduire l'incertitude quant au comportement futur de ceux-ci » (§570).

Un échange d’informations entre concurrents est considéré comme une entente horizontale anticoncurrentielle s’il porte sur des données confidentielles et stratégiques, au sens où leur connaissance diminue le comportement des concurrents sur le marché et leur incitation à se livrer concurrence (lignes directrices sur les accords de coopération horizontale, pt 61 de la version 2011 et pt 75 de la version 2023).

Le caractère stratégique n’est pas limité aux données sur les prix futurs ou à certains des facteurs déterminants de ces prix, mais s’étend à toute donnée non déjà connue, y compris des faits actuels ou passés.

Il ne se déduit pas de la seule nature de l'information mais s'apprécie au vu du fonctionnement concret du marché et des circonstances spécifiques à l'espèce.

Il convient d’établir si, dans le contexte entourant un tel échange, l’information « est de nature à réduire l'incertitude des participants quand on comportement futur des autres participants à l'égard de ce qui constitue, en raison de la nature des biens ou des services en cause, des conditions réelles du fonctionnement du marché et de la structure de celui-ci, un ou plusieurs paramètres au vu desquels s'établit la concurrence sur le marché en cause » (CJUE 29 juillet 2024, BANCO BPN/BIC Português SA / Autoridade da Concurrência, C-298/22, pt. 64).

C’est ainsi que, dans sa décision n° 17-D-03, relative à des pratiques relevées dans le secteur de la location de voitures, l’Autorité de la concurrence a considéré que les informations mensuelles, confidentielles, précises et individualisées, portant sur l'activité des loueurs de voitures (notamment leur chiffre d'affaires et leur nombre de contrats) émanant des aéroports ne permettaient pas aux loueurs d'obtenir une connaissance précise de la stratégie à court terme de leurs concurrents qui les aurait conduits à infléchir leur propre comportement sur le marché (Adlc, déc. n° 17-D-03, 21 fév. 2017, secteur de la location de voitures).

De la même manière, en l'espèce, l’Autorité a considéré que l’information n'est pas susceptible de réduire l'incertitude quand on comportement futur des autres participants au vu du fonctionnement concret du marché et des circonstances spécifiques de l'espèce.

D'abord parce qu’il s’agit d’informations passées, même si récentes, concernant les volumes vendus aux distributeurs fluctuant d’un mois à l’autre en fonction d’évènements extérieurs (ex : soldes), et ne permettant pas de déduire les conditions d’approvisionnement.

Ensuite, parceque, dans le secteur concerné, les opérateurs avaient besoin d'informations plus précises pour analyser les ventes de leurs concurrents et que, même croisées avec d'autres données accessibles aux opérateurs en question, les informations n’acquerraient pas un intérêt stratégique.

L’Autorité a donc prononcé un non-lieu à l’égard de l’organisme professionnel sur le terrain des ententes horizontale mais a en revanche qualifié 10 ententes verticales de fixation de prix de vente au détail condamnant pour 611 millions d'euros dix fournisseurs et deux distributeurs.
 

Historique

<< < 1 2 3 4 5 6 7 ... > >>